Louis ARAGON (1897-1982) - Je t'aime tant

 

Mon sombre amour d'orange amère

Ma chanson d'écluse et de vent

Mon quartier d'ombre où vient rêvant

Mourir la mer

Mon beau mois d'août dont le ciel pleut

Des étoiles sur les monts calmes

Ma songerie aux murs de palmes

Où l'air est bleu

Mes bras d'ormes faibles merveilles

Renaissent ma soif et ma faim

Collier collier des soirs sans fin

Où le cœur veille

Est-ce qu'on sait ce qui se passe

C'est peut-être bien ce tantÔt

Que l'on jettera le manteau

Dessus ma face

Coupez ma gorge et les pivoines

Vite apportez mon vin mon sang

Pour lui plaire comme en passant

Font les avoines

Il me reste si peu de temps

Pour aller au bout de moi-même

Et pour crier Dieu que je t'aime

Je t'aime tant, je t'aime tant